10/06/2009
Une peau trop douce
Il est dix-neuf heures douze à ma montre, l'horloge de la voiture de ma soeur indique dix-neuf heures quinze.
-Tu vas voir, Hervé, tu vas t'amuser. Et puis, cela te sort un peu. En plus, il y aura plein de jolies mannequins.
-Super... un tas d'anorexiques...
Ma soeur Cécile a eu la « brillante » idée de m'emmener de force à un défilé de mode qui selon elle est l'événement de l'année. Pour moi, c'est surtout l'événement qui me fait manquer le match Paris - Marseille. Malheureusement, ma soeur a toujours le dernier mot.
Je suis accoudé sur le bord intérieur de la fenêtre de la Clio rouge et regarde à travers la vitre. Paris m'a toujours fasciné. J'y avais rencontré Marianne, il y a dix-sept ans. Je venais d'emménager dans la Capitale et désirais la visiter. Ne sachant pas comment me rendre à Notre-Dame de Paris, j'avais demandé à quelqu'un quelle ligne de métro j'étais supposé prendre. Cette personne se trouvait être Marianne. Et puisqu'elle y allait aussi, elle m'avait emmené en voiture. C'était dans cet endroit magnifique qu'est la Cathédrale que j'étais tombé amoureux. Fatigué, je m'étais assis sur un banc. Marianne était face à moi, debout. Le mélange des chants de la chorale, de la beauté des vitraux et des sculptures ainsi que cette sensation de légèreté que l'on éprouve dans un lieu comme celui-ci étaient parfaits pour avoir un coup de foudre...
- Arrête, m'interrompt ma soeur.
-Quoi ?
- De penser à elle. Tu sais, ce n'est pas en restant cloîtré chez toi que tu vas l'oublier. Cela fait maintenant deux ans et...
-Tais-toi! lui dis-je sèchement. Je ne veux pas en parler.
Nous arrivons au parking de l'hôtel sans dire un mot de plus. Nous entrons. Mes yeux s'écarquillent. La salle où a lieu le défilé doit faire au moins la longueur de deux stades. Une foule de personnes s'agite devant moi. Au centre, le podium tout de verre construit est soutenu par des barres en acier. Un grand écran à l'arrière retransmet le défilé pour les personnes trop éloignées. Sur la droite, un buffet immense présente plus de nourriture que je ne pourrait engloutir en une vie : sushis, caviar, foie gras et toute une farandole de légumes crus. Sur la gauche, a été installé une grande piste de parquet sur laquelle les gens dansent, se saluent, discutent. Le vacarme est insupportable. Un mélange de langues différentes m'agresse:
- Bonsoir !
- Hola !
- Stop it please !
- Gracie.
Je me retourne afin de me plaindre auprès de ma soeur mais elle a disparu. Je m'enfonce alors difficilement dans la foule en direction du buffet. Mais soudain, je l'aperçois, deux centièmes de secondes à peine. Je reviens sur mes pas mais la foule m'empêche de la retrouver. J'essaye de me remémorer ce que j'ai vu. Elle se trouvait à cinquante mètres sur ma gauche. Ses longs cheveux blonds sont lâchés. Elle porte une robe originale rose et jaune, ou rose et orange, je ne sais plus. Son visage... est... je ne me rappelle plus. Le seul détail qui me revient est qu'elle a une peau que l'on sait douce même de loin; on la croirait presque inhumaine. Et son allure est tellement gracieuse qu'elle doit marcher à la manière d'un ange, comme sur des nuages.
- Hé, tu rêves ?
- Euh, quoi ?
- Tu rêves ? répéte ma soeur.
- Euh... non, non, balbutié-je.
- Pourquoi tu rougis ?
- Je ne rougis pas !
- Menteur !
- Quoi ? Mais tu dis n'importe quoi !
- Arrête, quand tu mens tu te grattes le nez !
- Quoi ? Mais euh... bon d'acord, dis-je en mettant mes deux mains dans les poches. J'ai aperçu une femme et elle m'a tapé dans l'oeil. Malheureusement, je ne la trouve plus.
- Une femme ! Mais c'est génial ! Après deux ans mon frère pense enfin à quelqu'un d'autre qu'à Marianne, dit-elle en souriant.
- Ouais, enfin je n'ai pas dit que je voulais l'épouser non plus.
Marianne a été ma femme pendant quinze ans jusqu'à ce qu'elle me quitte pour mon meilleur ami. Je roulais en C15, lui en Ferrari. Je ne me suis pas posé plus de questions sur la raison de son départ.
- Elle est comment ?
- Blonde avec une robe rose-orangée.
- D'accord, je la cherche.
Ma soeur part pleine d'espoir. Moi, aucun. Et puis, que pourrais-je bien lui dire ? Je me rappelle qu'à l'époque du lycée, je savais comment aborder les filles, j'avais mes phrases toutes faites. Mais aujourd'hui, qu'est-ce que l'on dirait si un homme de quarante-cinq ans disait à une femme : «Attends, tu viens de faire tomber quelque chose, c'est mon coeur qui bat pour toi » ?
En plus, je suis vieux, petit, j'ai le ventre des hommes qui boivent trop de bières, je n'ai pas de discussion, pas de centre d'intéret. On a l'impression que mes yeux sont toujours injectés de sang et je transpire facilement. Qui voudrait de moi ?
Mais tout à coup, je la revois. Une seconde seulement, entre deux têtes. C'est alors que sur un coup de tête [répétition] je décide d'aller dans sa direction afin de pouvoir peut-être la revoir et l'aborder. Je ne suis plus un dragueur expérimenté, mais je pourrais improviser.
J'avance difficilement, essayant de me faufiler entre les gens - un mot grossier sortant parfois de ma bouche contre mon gré. Même avec la certitude qu'elle ne voudra jamais de moi, j'avance comme poussé par une force invisible.
Arrivé au bout de la salle, je la vois. Elle est là, immobile, adossée à une porte comme je l'ai vue quelques minutes auparavant. Blonde, comme je l'ai vue, avec une robe rose et jaune, comme je l'ai vue. Elle a une peau qui doit être extrêmement douce, et en effet elle doit avoir de la légereté dans ses gestes, comme je l'ai vue. Elle est vraiment magnifique, comme je l'ai vue. Cependant, arrivé devant elle, je comprends qu'elle ne me repoussera pas. La femme de mes rêves n'est qu'un vulgaire mannequin en plastique.
(Valentin Neuranter et Léa Panier)
22:10 Publié dans Ecritures | Lien permanent | Commentaires (0)
Entrer dans l'histoire
J’ai seize ans depuis deux jours. Je me sens presque un homme par cette belle journée. Mes parents qui sont cordonniers m’ont offert une belle paire de bottes en cuir souple qui vont à merveille avec mon habit vert. J’aperçois mon reflet dans l’eau de la Seine et me trouve très élégant : je porte bien l’habit car je suis assez grand et pratique le fleuret depuis cinq ans. Je suis de bonne humeur et me ballade tout en observant la foule.
Le sol pavé est jonché de détritus. Leur odeur envahit mes narines, j’en ai presque la nausée. Il fait si chaud. Je suis dans l’Ile de la Cité, la cathédrale Notre-Dame de Paris semble toucher le ciel, les gargouilles grimacent. Le soleil se reflète sur la Seine qui charrient ses eaux sales, les rats se faufilent sur le rivage.
Un carrosse est bloqué sur le Pont au Change. Les chevaux se cabrent et hennissent. Le cochet les fouette à tour de bras. Une barricade bloque le passage.
Je rejoins un groupe de manifestants [anachronisme] très énervés qui hurlent des insultes à l‘encontre du roi. La foule gronde en ce 28 juillet 1830.
Je décide de suivre les révoltés qui se dirigent vers l’Hôtel de Ville en chantant la Marseillaise.
Je demande ce qui se passe à un gamin, il me dit que les ministres s’enfuient pour se réfugier au Palais des Tuileries.
Ça y’Est-ce n’est plus un bruit qui court dans les rues de Paris. Sur tous les ponts de Paris, l’on se bat. Les rues, sont en feu, la moitié de leurs arbres sont abattus et il serve à élever des barricades.
Le peuple se soulève, ils ne veulent plus de ce roi Charles X.
Cette journée deviendra peut-être historique, je veux la vivre, y participer ! Tous mes sens et ma curiosité sont en alerte.
J’arrive place de l’Hôtel de Ville.
De violents affrontement viennent de se produire. Partout des cris... L’odeur de la poudre des fusils me pique la gorge.
Ça y est, le peuple est rentré dans l’Hôtel de Ville, un homme hisse le drapeau tricolore au sommet du monument en chantant la Marseillaise.
Un soldat me bouscule, il est surexcité, je tombe…..Des hommes me piétinent. Je hurle, un paysan [que fait-il là ?] survolté me dit de me taire, je ne l’écoute pas. J’ai peur, je suis en sueur, je claque des dents, je continue à crier. Excédé l’homme sort un énorme gourdin et me le fracasse sur le crâne ! Une horrible douleur m’envahit, le sang coule, je ne vois plus rien, j’ai mal au cœur, j’ai mal, je claque des dents, j’ai si froid, je faiblis, je vais mourir, je le sais et j’ai peur. Ma légendaire curiosité m’aura coûté cher ! J’avais encore tellement de choses à vivre…. Je me revois enfant, courant dans les champs de blé en riant à la campagne……mon rire s’éloigne, je sombre dans un univers noir et froid.
Je reviens à la réalité... mais où suis-je ?
«Tu es tombé dans les pommes!» me dit un camarade.
Je me lève, la tête qui tourne encore un peu.
Nous sommes au Louvre.
Je m’éloigne peu à peu du tableau d’Eugène Delacroix «La liberté guidant le peuple». Je peux encore le voir distinctement.
Un homme attire mon attention, il me semble le reconnaître….
(Julien Bonis)
20:28 Publié dans Ecritures | Lien permanent | Commentaires (0)
Le violeur de la Seine
[une excellente nouvelle, haletante et aux descriptions riches !]
Paris 1763. Mois de mai, le ciel est bleu, la Seine suit son court sous les échos des cloches de Notre-Dame de Paris. Rien ne pouvait prétendre à une telle course-poursuite… La Bastille [à l'époque, ce n'est pas une place, mais une forteresse!] tremblait sous les pas d’une émeute. Les pavés se brisaient. Les poutres apparentes des maisons qui longeaient la rue se craquaient. La rue, pleine de boue et de déchets, puait. Les enjambées des manifestants remuaient les puanteurs, éclaboussaient les passants ; faisaient vibrées Paris au rythme de cette cavalcade infernale. Les toits qui recouvraient le bord de la rue semblaient recouvrir la scène, à tel point qu’elle devint obscure comme les ténèbres où [faites une autre phrase] le bruit assourdissant des cris des poursuivants résonna jusqu’à Versailles.
Un homme qui se trouvait à quelques pas de là, s’approcha, intrigué par ce vacarme incessant. Il y vit un jeune homme affolé à la tête du cortège, qui courrait à toute allure. Une foule enragée le suivait de près, armée de fourche, d’épées, de flambeaux et toutes sortes d’objets loufoques. Une centaine de personnes criait d’une voix « Abattez-le ! A mort le Violeur ! ».
Nous pouvions entendre de par et d’autre de l’avenue, tel des chuchotements, des passants s’exclamés : « Oh mon Dieu. Qu’est ce qu’il a bien pu faire à ces gens !!? », « J’ai entendu son histoire, hier soir dans les jardins du Palais Royale. », « C’est ignoble ! », « C’est un montre » ; « C’est le tapissier du Marais». «Exactement, il est accusé d’avoir violé sept jeunes et ravissantes demoiselles, en à peine une semaine ! »
Toutes les victimes avaient décris le même homme : quelqu’un d’assez grand, aux cheveux foncés, avec une vois rauque. Il était imposant, et portait une longue cape noire. C’est suite a cette description, que tout le monde pensa que s’était le jeune tapissier qui travaillait non loin de l’Hôtel de Sully. Le coupable étant trouvé, la foule voulu le tué. Mais l’artisan niait les faits, il tenta alors de fuir. C’est alors que commença [il faut des plus que parfait : c'est un retour en arrière] une affolante course-poursuite.
Le suspect courrait, alors, le plus vite qu’il ne pouvait le long de la Seine, ses pied claquaient contre les pavés, ses oreilles sifflaient si fort qu’il aurait pu en devenir sourd. Les cris de la foule n’étaient maintenant qu’un murmure. Ses chevilles craquaient, ses bras se balançaient aussi rapidement que le battement de son cœur. Son cœur qui battait a la force de la peur ; une peur si intense. La peur de se faire tuer, qui lui donna un second souffle…
Il revit sa vie défilée, ses péchés, ses béats, sa femme, ses maitresses, ses enfants et une lumière blanche. Perdu dans ses idées, il se dirigea vers le fleuve et voulut le traverser.
Le témoin qui avait rejoint la foule, assistait à la scène. Posté sur le pont, il voyait la victime inondé de larme, pâle, hésitant.
Le suspecté violeur, se trouvait face à la Seine. Il tremblait de tout son corps. Il ne savait où poser son regard. Il regarda l’eau opaque de la Seine, cette –Dame- qui l’a vu grandir, qui l’accueillait lors de ses chagrins et qui désormais se celle qui l’a vu [concordance des temps ! Il faut un futur dans le passé] mourir.
Il plongea… anéanti par ce qui lui arrivait, le cœur brisé pas une population qu’il aimait tant : le peuple parisien. Ces hommes, ces femmes, ces enfants qui le poussèrent à ce plongeon… Mortel !
A peine arrivé au contact de l’eau sa respiration se coupa, ses membres atrophiés par la peur, tentaient de faire des mouvements pour ne pas couler. Mais ce fut peut concluant. Son regard troublé par l’eau, il vit pour la dernière fois Paris, entendit vaguement les cloches de Notre-Dame. Et sous les cris de joie des Parisiens… Il coula.
Posté sur le pont qui offrait une vue admirable à toute cette agitation, le mystérieux inconnu prit la parole et s’adressa à la foule d'une voix rauque : « Nous sommes chacun responsable de nos actes. La colère et la haine paralysent la recherche du véritable coupable. Un homme bon, honnête et sincère est mort aujourd’hui. La suite vous surprendra… ». Et sa silhouette imposante s'éloigna, sa cape noire au vent. [reprenez exactement les même termes que dans votre description du violeur]
(Vincent Divaret et Maxime Gouel)
15:17 Publié dans Ecritures | Lien permanent | Commentaires (0)